Les dessous de l’externalisation en Malaisie
En août dernier, le procès de Charles Hector, avocat et défenseur des droits des travailleurs en Malaisie, s’est soldé par une condamnation pour diffamation. Le 15 décembre, une centaine d’organisations manifestent contre l’amendement de “l’Employment Act”. Entre les deux événements, il n’y a apparemment aucun rapport. Et pourtant… ce procès en cachait un autre: celui des sociétés d’externalisation de main d’oeuvre. Un cas plutôt embarrassant pour les entreprises françaises implantées en Malaisie, mais aussi un enjeu politique pour l’actuel gouvernement malaisien.
C’était en février dernier. Pour la première fois en Malaisie, une entreprise privée poursuivait en justice un défenseur des droits de l’homme. Son crime ? Avoir dénoncé les conditions de travail de 31 Birmans, victimes des pratiques d’externalisation de leur employeur.
Charles Hector est un avocat connu des travailleurs migrants. C’est donc naturellement vers lui que la communauté birmane s’est tournée lorsqu’elle a appris le sort de ses ressortissants, employés dans la filiale malaisienne d’Asahi Kosei, une entreprise japonaise d’électronique.
Car porter plainte contre un employeur n’est pas simple pour les migrants “leur visa n’est accordé qu’à la demande de l’employeur”, explique Lateefah Koya, avocate malaisienne spécialiste de la question des réfugiés.Et la situation se complique dans le cadre d’une externalisation : “Lorsqu’ils portent plainte, on leur demande le nom de leur employeur. En cas d’externalisation, le nom ne figure pas sur le visa, les douaniers ferment un oeil”.
Une plainte avait pourtant déjà été déposée auprès de la commission nationale des droits de l’homme (Suhakam) et du ministère des Ressources humaines.
A Charles Hector, les employés déballent : “menaces d’expulsion, non paiement des salaires, des amendes de 50 ringgits (12 euros) par jour d’absence pour un salaire journalier de 20 ringgits, absence de couverture médicale…”
L’avocat demande des éclaircissements à Asahi Kosei : “j’avais prévenu l’entreprise que, sans réponse dans un délais raisonnable, je publierais les témoignages des travailleurs sur mon blog“, précise-t-il.
Asahi Kosei réagit enfin: sans sommation, elle poursuit l’avocat pour diffamation, lui demandant pas moins de 2,5 millions d’euros.
Les mois suivants, plusieurs dizaines d’organisations des droits de l’homme (Human Rights Watch, la FIDH, Aliran…) manifestent leur soutien à Charles Hector, contre ce qui apparaît en premier lieu comme une atteinte à la liberté d’expression d’un blogger. Fin août, la justice tranche: elle condamne Charles Hector à verser 1 ringgit symbolique à l’entreprise et à faire des excuses publiques. Ce faisant, elle rejette le témoignage des 31 victimes… laissant présumer qu’elle cherche à étouffer une affaire gênante pour les intérêts commerciaux de l’entreprise.
Lire la suite sur AlterAsia, le site de l’information citoyenne en Asie du Sud-Est
Illustration : DR/Clean Clothes Campaign
Source:-http://webasies.com/les-dessous-de-lexternalisation-en-malaisie/